Le soleil avait été arrassant, plombant la ville sous une chaleur de plomb, la laissant somnoler comme un chat épuisé. Peu d'âmes s'aventurèrent au dehors, préférant rester dans la fraîcheur toute relative de leurs maisons, leurs ventilateurs.
Une belle journée, une merveilleuse journée pour moi, les sangsues ne tenteraient en aucune façon de mettre le nez dehors, au risque de finir en petit tas de cendres, et je me surprenais alors à rêver que le jour remplace la nuit éternellement.

"Miss Blackmoon" La voix somnolente de mon patron me tira de ma rêverie, et je tournai les yeux vers lui, détournant alors mon regard des rues désertes. Je le savais, ma tranquillité personnelle allait être mise à mal dans 3,2,1...

"Un papier à faire... "

0... Je le savais, et vu le ton plus qu'enthousiaste de ce bonhomme, j'allais écoper du scoop du siècle, aussi passionnant que la passion de Monsieur Brandon Jean-Roger pour les nains de jardins, ou Madame Mauricette Dugobu qui cherchait son caniche.

Sans un mot, je pris le bout de papier qu'il me tendait, un post-it jaune passé.
Ces derniers temps, la canicule s'était installée sur la Louisiane, de façon à ce que les nuits ne suffisaient souvent plus à rafraîchir l'air ambiant.Et bien entendu, on comptait nombre de personnes qui en mourraient.... enfin, théoriquement parlant.

"Un papier sur les morts de la canicules?" mes yeux toujours posés sur le bout de papier, se levèrent pour jauger mon interlocuteur.
Celui-ci fit un oui rapide de la tête et sortit, me laissant seule avec mon sujet d'étude.
Mais contre mauvaise fortune, je me devais de faire bonne figure, et ce sujet pouvait se révéler intéressant finalement, car, il était fort à parier que certaines sangsues profiteraient de cette nouvelle pour aider quelques personnes à passer l'arme à gauche.

Je souris. Ce soir, il y aurait peut être quelques grammes de cendres en plus sur terre.

Attrapant mon sac, je sortis de mon bureau, et décidais de prendre le chemin de l'hôpital principal de la ville. Si je devais commencer quelque part, c'était bien là bas, la morgue s'y trouvait, et peut être que je pourrai trouver des pistes plus intéressantes.
Tout en marchant d'un pas décidé et rapide, je réfléchissais à la manière d'amener la chose, la façon dont je pourrai obtenir un maximum d'informations qui me mèneraient, non pas à l'article du siècle, mais à une sangsue.
Sans m'en rendre compte, le temps avait passé, et le soleil déjà déclinait à l'horizon, laissant la place à une nuit tout aussi chaude, mais étoilée et claire. Je repensais à ces ères qui cherchaient la fraîcheur, et me disais en mon fond intérieur qu'elles ne le trouveraient pas dans les ombres nocturnes.

Enfin, j'arrivai en vue de l'hôpital, entrais tranquillement et me dirigeais vers l'accueil où une infirmière semblait travailler sans grande conviction.

"Bonsoir, Je suis Sybelle Blackmoon du New Orlean's, je voudrai parler à quelqu'un s'il vous plait, nous faisons un sujet sur la canicule et les conséquences sur la population. "

La jeune fille de l'accueil leva la tête, visiblement débordée.

"Oui, bien sûr, euh... je peux vous appeler quelqu'un..."
Elle s'exécuta aussitôt et composa un numéro.
Pendant qu'elle parlait à je ne sais quel interlocuteur, je profitais de l'occasion pour observer la salle. Cà et là, des pauvres âmes affalées sur les sièges attendant un quelconque secours médical, ou des nouvelles d'un proche. De temps à autres, une équipe de pompiers arrivait et déposait un brancard, dans un ballet parfaitement synchronisé. Quel drôle d'univers qu'un hôpital humain.

"....Elle va arriver et répondre à vos question."
On me tira de nouveau de ma rêverie.
Je n'entendis que la fin de la phrase prononcée, mais cela me suffit, et je la remerciais d'un geste de tête.

Autour d'elle, la région entière souffrait d'une trop intense chaleur apportée par les rayons du soleil. Ce n'était en revanche pas le cas de la vampire qui demeurait à l'abri, dans la fraîcheur du sous-sol de sa demeure dans lequel elle avait aménagé un espace suffisamment confortable. Là, tandis que l'humanité devait endurer les caprices de l'astre du jour, Alice se contentait de dormir d'un sommeil de plomb, qu'il aurait été difficile, voire impossible d'interrompre. Mais peu à peu, la soirée avança, et le soleil déclina. Dès l'instant où les derniers rayons eurent disparu à l'horizon, ses yeux s'ouvrirent et elle se leva, parfaitement reposée. Elle remonta rapidement jusqu'au rez-de-chaussée et consulta l'horloge du salon. Elle n'était supposée commencer sa garde que dans une heure, et pourtant, il lui faudrait partir sur le champ. En effet, depuis deux jours elle se trouvait contrainte d'effectuer son service à l'hôpital de Nouvelle-Orléans, au lieu de celui de Shreveport où elle avait l'habitude de travailler. Ce changement s'expliquait à la suite d'un manque d'effectif à l'hôpital de Nouvelle-Orléans, qui avait demandé à Shreveport de fournir quelques infirmière pour un laps de temps déterminé. Le choix s'était fait au hasard et Alice était bien loin d'en être satisfaite, malgré la compensation financière dont elle bénéficiait pour cela. Alors que Shreveport se trouvait si près qu'elle pouvait s'y rendre à pied grâce à ses capacités de vampire, ce n'était pas le cas de la seconde ville. Oh, bien sûr, elle aurait pu s'y rendre à la course, mais ce serait inutilement long. À la place, elle préférait prendre sa voiture, un véhicule qu'elle s'était procuré quelques mois auparavant et qu'elle n'utilisait sans doute pas suffisamment.

Rapidement, elle se changea dans sa chambre à l'étage, puis prit son sac et ses clefs et sortit de la maison, après avoir bien sûr avalé quelques gorgées de Tru Blood en guise de petit-déjeuner. Elle s'engouffra dans sa voiture avant de démarrer. Heureusement, la route était plutôt dégagée, et elle ne tarda pas à arriver jusqu'à la ville où elle était supposée travailler ce soir. En revanche, une fois là-bas, les choses se compliquèrent et elle eut du mal à atteindre l'hôpital et à trouver une place de parking où se garer. Une fois que ce fut fait, elle sortit et se dirigea vers l'entrée réservée au personnelle. La soirée était plutôt chaude, mais très supportable malgré tout. Elle songea que les journées, en revanche, devaient être plutôt terribles et fut assez satisfaite pour une fois de ne pas avoir à les supporter. Une fois à l'intérieur, elle se rendit au vestiaire où elle put remplacer ses vêtements classiques par son uniforme d'infirmière, ainsi que son badge, avant de prendre son service.

Elle devait admettre qu'il y avait quelque chose de plutôt agréable dans le fait de travailler au sein d'un hôpital aussi grand. À Shreveport, le personnel était plus réduit et tout l'équipe se connaissait, ou presque. Sa nature de vampire n'était là-bas qu'un secret de polichinelle. En revanche, ici, il y avait tant de personnel qu'elle se fondait dans la masse avec aisance, et à part peut-être une ou deux personnes, nul ne semblait savoir ce qu'elle était, ou même s'en soucier. Un tel anonymat lui faisait du bien. Durant tout ce temps, son double imaginaire, celle qu'elle surnommait l'Autre, ne cessait de la suivre. Néanmoins, elle la laissait relativement tranquille lorsqu'elle travaillait. Alice aimait le fait d'être aussi occupée à quelque chose. Les moments où elle se trouvait au sein de l'hôpital étaient ceux où elle se sentait le plus en sécurité, où sa folie semblait plus loin que jamais. Elle était sans cesse occupée à quelque chose et n'avait ni le temps de penser, ni de réfléchir. Elle contrôlait heureusement parfaitement sa soif dans ces moments là.

Alors qu'elle terminait d'effectuer quelques points de suture sur un patient, l'infirmière responsable la rejoignit pour lui signaler qu'une journaliste souhaitait interroger un membre du personnel et qu'elle était la seule à peu près libre. Son ton ne semblait souffrir aucune protestation, et Alice s'exécuta de mauvaise grâce, après avoir terminé de s'occuper de son patient. Elle imaginait bien que venant de l'extérieur, elle devenait celle à qui incombaient les corvées de ce genre. Elle réalisa que la responsable ne lui avait pas dit de quoi il s'agissait exactement, et qu'elle n'avait pas songé à le demander. L'Autre se manifesta pour lui fournir une suggestion, tandis qu'elles marchaient côte à côte dans le couloir. « Peut-être qu'elle fait un reportage sur les vampires travaillant en milieu hospitalier ? » Cela ne semblait pas dénué de sens, mais Alice attendait de l'entendre. « Peut-être... »

La vampire marcha encore quelques mètres avant de pousser la porte qui menait à l'accueil. Elle se dirigea vers la jeune femme qui attendait là, et qui avait l'air bien trop calme pour être une patiente ou rattachée à un patient. Affichant un sourire, elle décida de se montrer aimable avec elle. Plus vite ce serait passé, mieux ce serait.

« Vous êtes la journaliste, je suppose ? Je m'appelle Alice Price, je suis infirmière dans cet hôpital. » Sur ce, elle lui tendit une main cordiale, avant d'afficher un air interrogateur. « Pardonnez-moi, mais on ne m'a pas précisé le but de votre visite... »

On me fit patienter, et déjà, la jeune fille de l'accueil reprenait ses papiers de façon plutôt vive et rapide. Sans doutes il y avait-il pas mal de travail en ces jours de chaleur, mais en observant la salle d'attente, je venais à en douter.

C'est alors qu'apparut mon interlocuteur, ou plutôt devrais-je dire mon interlocutrice, car il s'agissait bien d'une jeune femme, au visage finement taillé, et arborant d'immenses yeux bleus.
Et elle prononça quelques mots, à commencer par sa présentation: Alice J Price.
Je fit donc un petit geste de la tête rapide, en signe de salutation:

"En effet, je suis journaliste au New Orlean's, Sybelle Blackmoon, enchantée." Et sur ces entrefaits, cette dernière me tendit une main amicale que je pris sans me poser de questions. Mais le contact avec la peau d'Alice m'arrêta dans mon élan, et je tiquais. Sa peau était froide comme la mort, et il n'y avait alors aucun doute concernant la nature de la "jeune" infirmière: une vampire.
Je levais mes yeux vers elle, la jaugeant du regard, sans pour autant laisser transparaître la moindre émotion, puis, étirant un tantinet mes lèvres, je souris. En mon fort intérieur, je jubilais, une vampire qui se présentait devant moi sur un plateau d'argent. Mais pour l'heure, et en ce lieux, impossible de purifier cette créature sans éveiller des cris d'alertes et des soucis pour moi. Je me décidais donc à attendre mon heure, attendre avec la patience qui me caractérisait. J'avais l'éternité pour moi.

"Nous faisons un sujet sur la canicule et les conséquences sur la population. Il s'agit d'informer nos concitoyens sur la situation actuelle, et leur délivrer des conseils pour éviter de voir les morgues et hôpitaux se remplir." J'avais tendance à parler doucement, comme pour préserver le silence lourd qui régnait dans la pièce, silence que troublait à peine l'infirmière de l'accueil dans sa frénésie de travail.
Je gardais néanmoins mon regard fixé sur Alice, observant la moindre de ses réactions, de ses tics, de ses clignements de yeux.

"Combien de morts avez vous reçus depuis le début de la canicule? avez vous vu des cas de patients présentant des contusions et autres signes de violence ?"

Professionnelle, j'entrai rapidement dans le vif du sujet, car je ne souhaitais en aucun cas perdre mon temps, et faire perdre le temps de mon interlocutrice. Je trouvais la chose plutôt ironique à vrai dire, le fait de voir une sangsue, prédatrice par nature, exercer dans la médecine, pour sauver.... des humains. Qu'est-ce qui l'avait poussée à choisir cette voie là? Pourquoi?
Autant de questions qui arrivaient dans mon esprit, et provoquaient une sorte de curiosité. Peut être attendrai-je un petit peu avant de la faire partie en fumée, celle-là.

Une fois les présentations faites, Alice s'était permis d'examiner plus en détail son interlocutrice. La journaliste avait en effet certaines caractéristiques physiques plutôt étonnantes pour une humaine. Ses longs cheveux d'une couleur argentée contrastaient avec la jeunesse de ses traits. Ses grands yeux bleus donnaient une impression presque surnaturelle à son apparence. Immédiatement, la vampire fut intriguée par cette jeune femme. Ce ne fut que lorsqu'elle s'approcha d'elle pour lui serrer la main que l'odeur qu'elle dégageait frappa ses narines. Il s'agissait d'un parfum absolument délicieux, qui évoquait pour elle une sorte de paradis sucré. Un sourire se dessina sur son visage. Non, elle était bien loin de n'être qu'une simple humaine. Elle songea qu'elle devrait se montrer prudente. Dans son état normal, elle était tout à fait capable de résister, mais si jamais elle dérapait, cette demoiselle risquait fortement de devenir son déjeuner. Elle n'avait ni envie d'être renvoyée, ni d'avoir plus de problèmes qu'elle n'en avait déjà. Elle s'efforçait donc de conserver une certaine distance, ne serait-ce que pour éviter une sortie soudaine de ses crocs. Savait-elle ce qu'était vraiment Alice ? Elle ne parvenait pas à lire la moindre réaction en elle, mais quoi qu'il en soit, sa nature n'était pas vraiment un secret, et cela pourrait aussi bien venir dans la conversation.

"Nous faisons un sujet sur la canicule et les conséquences sur la population. Il s'agit d'informer nos concitoyens sur la situation actuelle, et leur délivrer des conseils pour éviter de voir les morgues et hôpitaux se remplir." Alice découvrit que le sujet de sa convocation ne correspondait absolument pas à ce qu'elle avait pu imaginer. En entendant ces mots, l'Autre, qui était assise sur le comptoir, éclata de rire, à tel point qu'elle faillit tomber de son perchoir. « Pauvre fille, elle doit avoir fait quelque chose d'épouvantable pour se coltiner un sujet si ennuyeux. » La vampire ne répondit pas, se contentant de jeter un regard noir à son double dont les commentaires l'empêchaient de se concentrer sur la journaliste. Puis, elle se tourna de nouveau vers Sybelle avec un sourire poli. « Pour tout vous avouer, je ne travaille ordinairement pas ici et je ne suis peut-être pas la mieux placée pour vous aider. Malheureusement je suis la seule infirmière disponible, et je vais tenter de vous répondre de mon mieux. »

"Combien de morts avez vous reçus depuis le début de la canicule? avez vous vu des cas de patients présentant des contusions et autres signes de violence ?" Elle apprécia que la jeune femme pose ses questions directement. Ainsi, elle pouvait espérer que l'entretien se termine rapidement. Si elle avait su qu'elle aurait à se prêter à ce petit jeu, elle aurait évité de venir travailler cette nuit. Malheureusement, elle se trouvait là et ne désirait pas non plus se montrer désagréable. « Et bien, d'après les chiffres que j'ai pu avoir, sept personnes sont mortes depuis le début de la canicule, ce qui est plutôt conséquent. » La deuxième question de la jeune femme était un peu plus compliquée pour elle, qui n'avait pas pu suivre tous les dossiers des patients. « Le manque d'hydratation a tendance à provoquer une importante faiblesse physique, et à ce moment là, les accidents peuvent survenir, notamment des chutes. Les principaux touchés sont en général les personnes âgées. Nous avons eu plusieurs cas de ce type. » Elle s'arrêta, attendant la question suivante tout en fixant la jeune femme de son air poli et innocent, si innocent qu'il aurait été difficile d'imaginer quel monstre elle pouvait être dans ses pires moments.

Je notais les informations qui arrivaient, affichant sur le visage une sorte de petite moue de concentration presque candide. A vrai dire, c'était bien là l'une des dernières facétie enfantines qu'il me restait, comme une réminiscence d'une autre vie.

Mes pensées s'étaient perdues, à nouveau, bercée par la voix délicate de la vampire, je laissais mon esprit vagabonder, recueillir les petits fragments d'un passé jadis heureux et lumineux. Ce petit voyage me laissa comme un petit goût sucré.

"...sont en général les personnes âgées. Nous avons eu plusieurs cas de ce type."
La voix d'Alice me tira de mes rêveries, et je relevais avec surprise mes yeux sur elle, avant de me rendre compte, un peu gênée, que j'avais encore décroché du monde réel.

"Oui... certes.... c'est gênant..." Il me fallut quelques secondes pour revenir sur terre et reprendre mes esprit, et dans un petit toussotement de circonstance, je tentais de reprendre contenance.

"Mais..." Je ne pris pas beaucoup de temps à revenir à mes moutons, car j'avais tendance à reprendre mon cap assez rapidement. Je plantais mes yeux sur elle.
"...pensez vous que certains vampires aient put profiter de la canicule pour tuer à leur bon grès?"
La question était jetée, comme un cailloux dans une mare tranquille. J'aimais provoquer ce genre d'effets, une sorte de petit amusement, surtout face à une personne que je savais elle-même concernée par le sujet.

Un sourire s'étira doucement sur mes lèvres, aimable de surface, amer en substance, je continuais à la détailler avec la tranquillité de mon âge, et si certains s'horrifiaient de voir le temps passer, les années s'accumuler, elles étaient chez moi gage de patience.

Deux éternels se faisant face, deux mondes se regardant, quel sujet de livre passionnant cela ferait-il.

Alice demeurait immobile, ses prunelles bleues rivées sur la jolie blonde. Plus elle la regardait, plus elle se sentait intriguée par cet être à l'odeur si délicieuse, une friandise à laquelle un jeune vampire n'aurait sans doute su résister à sa place. Bien sûr, si elle avait mieux connu les véritables pensées de la Fée, elle aurait sans doute eu bien moins de scrupule à son encontre. Elle leva un instant les yeux et croisa le regard de l'Autre qui affichait un sourire amusé. Scrutant la moindre expression de son visage, la vampire se rendit bien compte que la journaliste s'était quelque peu perdue dans ses pensées, mais fit cependant comme si elle ne s'était aperçu de rien et continua de lui fournir les informations qu'elle possédait de manière presque mécanique. Elle la vit sortir brusquement de sa rêverie avec un certain amusement. "Oui... certes.... c'est gênant..." L'Autre semblait particulièrement moqueuse à l'égard de cette jeune femme et leva les yeux au ciel d'un air dédaigneux. « Elle pourrait au moins faire semblant d'écouter ce que tu racontes... même si je dois bien admettre que c'est mortellement ennuyeux. » Alice se retint de rire à cette remarque, de crainte que Sybelle ne pense qu'elle se moquait d'elle, mais ses yeux brillaient d'un éclat malicieux qu'elle eut du mal à dissimuler.

"Mais...pensez vous que certains vampires aient put profiter de la canicule pour tuer à leur bon grès?" Cette fois-ci, la jeune vampire laissa échapper un léger rire, amusée par l'allusion qu'elle percevait sous cette question. Cette journaliste était plutôt maligne, il était assez rare que l'on puisse deviner du premier coup d’œil sa véritable nature, tant son visage semblait refléter toute l'innocence et la fragilité d'une poupée de porcelaine. Quelques années auparavant, Alice aurait été tout simplement horrifiée de voir qu'elle était découverte, mais depuis la Grande Révélation, ce type de situation était devenu relativement courant.

« Pour le moment rien ne laisse à penser une telle chose et aucune des victimes de la canicule ne porte de trace de morsure. Mais en vérité, je ne saurais réellement me prononcer, je ne passe guère de temps à surveiller mes congénères. »

Qui qu'elle puisse être, cette inconnue était loin d'être stupide, et la vampire devinait qu'il serait bien inutile de jouer les innocentes. Elle était trop vieille pour jouer à ce petit jeu et préférait encore se montrer franche. Ce qu'elle ignorait cependant, c'était où cette femme aux cheveux argentés voulait en venir. Pourquoi ne s'être contentée que d'une allusion quand elle aurait pu lui demander franchement son avis en tant que vampire ? Elle aurait cru qu'une journaliste se serait montrée bien plus directe. Elle sourit à son tour, imitant l'amabilité affichée de Sybelle. « Quel délicieux parfum vous portez, miss Blackmoon ! Vous l'a-t-on déjà dit ? » Elle ponctua sa question d'un sourire aimable, qui se voulait presque charmeur. Derrière la journaliste, elle voyait l'Autre qui regardait la scène avec une certaine avidité, impatiente de connaître la suite des événements.